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Ecole française de la 1ère partie du XIXe, cercle de François Marius GRANET (1775-1849)
Vue du lac D’Orta et de l’île San Giulio depuis Orta San Giulio, Italie, régions des Lacs
Huile sur panneauFormat à vue : 25 cm x 52,5cm – Encadrée : 42 cm x 69,5 cm
Cadre à canaux d’époque Ier Empire
Descriptif
Paysage italien magistral, romantique et réaliste représentant le lac d’Orta, joyau de la région des lacs ; plus confidentiel que le lac de Côme et le lac Majeur mais tout aussi splendide et familier à des artistes célèbres tels que Nietzche ou Balzac inspirés par sa sérénité.
Orta est d’ailleurs le lieu de création du chef d’œuvre nietzchéeen « Ainsi parlait Zarathoustra ».
Aisément identifiable tant sa topographie a finalement été préservée en deux siècles, l’on reconnaît l’embarcadère de la ville d’Orta San Giulio (au sud du lac d’Orta) adossé à un palais en aplomb, une arche puis une église, et à moins de 500m l’île de San Giulio nantie de sa paisible basilique, bordée de la majestueuse chaîne du Piémont.
L’atmosphère divinement romantique du lac d’Orta a été parfaitement saisie par l’artiste dont la manière est proche de François Marius Granet, maître du paysage, Conservateur au Louvre, qui, natif d’Aix en Provence, élève de Constantin d’Aix et de David, ami d’Ingres, séjourna près de vingt ans à Rome et épousa une italienne.
Ce paysage réalisé en « plein air » - mais non recomposé en atelier pour mieux l’idéaliser - se départ en cela de l’œuvre peint de Valenciennes.
Le traitement de la lumière, finement analysée et restituée par l’artiste qui a dû séjourner à Orta, fruit d’une longue observation et décomposition de ses particularités, découle de cette approche picturale qui donne la primauté à cette peinture sensible de l’instant, ici probablement peu après les rougeoiements de l’aube. C’est cet instant à la fois unique et typique d’une atmosphère propre à Orta qui est offert en partage.
Notre tableau possède notamment la lumière douce « dorée- orangée » comme fondue en un sfumato propre à certaines œuvres tant aixoises qu’italiennes de Granet (confère La Récolte des citrouilles à la bastide de Malvalat (1796) ou L’Arc de Volta Toretta près de Tivoli mais aussi le sens aigu de l’architecture, notamment religieuse). Dans son œuvre peint, Granet a en effet souvent mis en exergue le patrimoine religieux chrétien avec un goût pour les compositions fortement architecturées à laquelle il adjoignait une maîtrise du clair-obscur.
Sa composition ostensiblement harmonieuse réalisée dans une palette de tons pastels où tranche le feuillage au vert naturaliste d’un arbre colossal finement dessiné révèle un artiste abouti. La répartition de la composition suit le plan à la fois simple et complexe d’une diagonale.
Dans la partie gauche de cette diagonale une perspective naturelle exploitant une grande profondeur, l’évasion vers un symbole de pur romantisme, l’idéale rêverie où les monts fusionnent avec l’eau du lac, où peut émerger la fabuleuse histoire associée à l’île San Giulio débarrassée au IVe siècle de ses monstres par un saint éponyme valeureux ; et où, enfin, une gondole-jonque sert de trait d’union entre le réel et l’idéel.
Dans la partie droite de cette diagonale savamment pensée, l’irruption d’un quotidien attirant ; une scène animée mettant agréablement en scène des personnages, essentiellement des femmes italiennes, faisant leur marché, commerçant des oranges., au milieu d’étoffes, de jarres et même d’une chèvre et d’un boeuf figuré près d’une colonne. Une scène qui évoquerait presque la méditerranée et l’Orient alors qu’Orta se situe près de Milan.
Dans ce décor tout n’est que beauté.
A gauche, l’esthétique lacustre avec l’île de San Giulio, apparition quasi mystique sommée de montagnes.
A droite, une architecture renaissante, et l’ouverture, entrecoupée de personnages esquissés, d’une fine perspective vers cette ville-écrin qui s’intègre si bien au théâtre naturel de la région des lacs. Les eaux se distinguent du ciel par le plan des montagnes mais encore par la sublime transparence et les reflets si bien capturés par le pinceau du maître.
Observons que l’on retrouve cette composition géométriquement axée sur une diagonale, également dans une palette proche, au sein de l’œuvre « Le Forum triangulaire à Pompéï « (collection du Musée du Louvre) peinte par l’élève de Pierre-Henri de Valenciennes et de David, le bien nommé Achille Etna Michallon (1796-1822), autre peintre français fasciné par l’Italie.
L’Italie du début du XIXe siècle abondait alors de romanciers -comme Stendhal, d’intellectuels et de peintres français conquis par cette terra nova si proche, école de formation à la lumière fastueuse et au passé – archéologique, architectural et artistique - merveilleusement dense.
Ce goût français pour la Dolce Vita et l’imprégnation culturelle de « vacances » à l’italienne qui parfois faisaient souche se prolongèrent bien au-delà du Ier Empire ; Granet y séjourna de 1802 à 1824 et plus tard Ernest Hébert, prix de Rome, séjournera à la Villa Médicis de 1840 à 44 et dirigea l’Académie de France à Rome de 1867 à 1873 puis de 1885 à 1891.
Une immersion picturale et historique au cœur de la région des lacs et de l’Italie romantique, avec pour décor Orta, gemme secrète, aristocratique, abritée par les contreforts du Piémont.
Très belle provenance, collection prestigieuse.